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LGBT au travail

DAVOS – Lorsque le PDG d’Apple Tim Cook a annoncé l’année dernière qu’il était gay, j’ai été inondée d’e-mails et de messages téléphoniques de dirigeants du monde entier. En tant que dirigeant “out” chez Ernst & Young (EY), tout le monde semblait vouloir connaitre mon opinion sur ce que cela signifiait pour l’inclusion des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT) à l’échelle mondiale. Apple, après tout, se trouve à la cinquième place de la liste Fortune 500 des plus grandes entreprises du monde. Pouvait-on parler de la fin du « plafond de lavande » ?

Dans son article dans la revue Businessweek de Bloomberg, Cook décrit la manière dont le fait d’être gay a influencé sa vie : « Je suis fier d’être gay et je le considère comme un des plus grands dons que Dieu m’ait donnés. Être gay m’a donné une meilleure compréhension de ce que signifie être dans la minorité et m’a offert une fenêtre sur les défis quotidiens que connaissent les gens dans d’autres groupes minoritaires ».

Ma propre expérience du fait d’être « différent » est multiforme. Comme Cook, faire partie de la minorité a informé ma propension à être un leader inclusif. Contrairement à Cook, en plus d’être une homosexuelle refoulée, j’étais une femme, introvertie de surcroit, et ma politique avait tendance à différer de celles de mes pairs dans ma profession fortement dominée par des hommes extravertis. Depuis mon coming out en 2011, j’ai été publiquement plus fidèle à moi-même et plus authentique avec les autres. Cela a fait de moi un meilleur leader. En outre, le fait d’occuper une position de leadership dans une organisation mondiale m’a fourni une plate-forme pour parler ouvertement d’un large éventail de questions.

Il n’y a aucun doute à ce sujet : l’annonce de Cook a été un énorme pas en avant. Et les organisations internationales ont fait des progrès considérables dans l’inclusion LGBT en s’appuyant sur des réseaux externes et d’employés, ainsi que sur des politiques de non-discrimination.

Cependant, la plupart des statistiques disponibles aujourd’hui reflètent le progrès en Europe et aux États-Unis. Selon une étude récente par l’organisation de défense des droits des femmes Catalyst, 62% des sociétés Fortune 500 offrent maintenant l’assurance maladie aux cohabitants, tandis que 87% des entreprises du Fortune 500 – et 94 des 100 premières – ont des politiques de non-discrimination qui incluent l’orientation sexuelle.

En revanche, Todd Sears, fondateur de Out Leadership, un groupe de plaidoyer pour les employés LGBT, estime que 90% des travailleurs LGBT en Asie ne s’assument pas. Dans 78 pays, dont l’Ouganda et le Nigeria, ils sont toujours illégaux. Singapour a récemment confirmé sa législation stricte contre l’homosexualité. En Russie, le jour même de l’annonce de Cook, un mémorial pour le fondateur d’Apple Steve Jobs a été démantelé, ostensiblement pour se conformer à une loi interdisant la « propagande homosexuelle ».

Même aux États-Unis, où des membres du même sexe peuvent se marier dans 35 États (comme je l’ai fait à New York en avril dernier), dans 29 Etats, il est encore légal de licencier quelqu’un uniquement sur la base de son orientation sexuelle. Dans 34 Etats, il est légal de licencier un employé transgenre.

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Cela dit, les entreprises multinationales peuvent prendre plusieurs mesures pour promouvoir leurs stratégies d’inclusion LGBT à l’échelle mondiale. Pour commencer, elles peuvent renforcer l’« effet allié ». Les recherches menées par le Center for Talent Innovation montre que les alliés – les personnes qui soutiennent ou défendent des collègues LGBT – jouent un rôle décisif dans la création d’une communauté inclusive. En fait, 24% des travailleurs LGBT interrogés attribuent leur décision de faire leur coming out au boulot à leur réseau d’alliés. Les employeurs peuvent créer des réseaux qui invitent les travailleurs hétérosexuels à soutenir leurs collègues LGBT et parrainer les individus et les groupes LGBT.

De même, les cadres supérieurs qui font un coming out visible fait une énorme différence. Cook est un excellent exemple. Les employés LGBT sont 85% plus susceptibles de faire partie d’entreprises où les cadres supérieurs ont fait leur coming out (24% contre 13%). Chez EY, notre leadership LGBT a participé au projet vidéo “It Gets Better” en 2011, partageant des histoires pour aider des jeunes LGBT à risque. J’ai profité de l’occasion pour faire, avec le plein soutien de la direction de EY, mon coming out officiel. Non seulement j’ai parlé ouvertement de mes propres expériences ; j’ai aussi partagé combien la philosophie de mon organisation a joué un rôle important dans ma décision.

Cela nous amène à un point plus général : plus nombreux sont les gens qui entendent, voient et savent ce qui se passe dans une organisation, plus rapide sera le changement culturel. Faire une déclaration publique est une partie importante de ce processus, parce que les gens non seulement écoutent ce qui est dit, mais également observent ce qui se passe sans être personnellement contestés. Trop souvent, quand une organisation ne corrige pas une déclaration inexacte, celle-ci est considérée comme un accord.

Des solutions personnalisées aident également. Les entreprises devraient rencontrer des groupes LGBT dans d’autres organisations, à la fois au niveau local et au niveau mondial, et mettre en Å“uvre les politiques des régions les plus progressistes dans lesquelles ils font des affaires (par exemple, en Europe et aux États-Unis). Mais une solution unique n’est pas appropriée pour tous. Les stratégies fonctionnent mieux quand elles sont adaptées pour répondre aux exigences de conditions spécifiques, telles que les emplacements géographiques, le type d’unité d’affaires, ou la fonction du département.

Enfin, les entreprises devraient continuer à faciliter un milieu de travail inclusif pour tout le monde, et pas seulement les employés LGBT. Cela signifie passer d’une culture de la diversité, avec son accent implicite sur le « eux », à une culture centrée sur l’inclusion du « nous ».

Cook et moi partageons plusieurs positions communes concernant notre identité LGBT. Et je trouve que son annonce est conforme à ma propre expérience : « [Etre homosexuel] m’a rendu plus empathique, ce qui m’a permis d’avoir une vie plus riche. Cela a été dur et inconfortable par moments, mais cela m’a donné la confiance nécessaire pour être moi-même, suivre mon propre chemin, et passer au-dessus de l’adversité et du sectarisme ».

Le plafond de lavande a été fissuré, mais aujourd’hui il n’existe aucun endroit au monde où l’inclusion a été pleinement atteinte. Il y a encore beaucoup à faire.

Traduit de l’anglais par Timothée Demont

Beth Brooke-Marciniak est vice-président mondial de la politique publique chez Ernst & Young.

Copyright: Project Syndicate, 2015.
www.project-syndicate.org

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