[bsa_pro_ad_space id=1]

Commentary

Pour une résolution définitive de la crise grecque

ZURICH – Pour éviter que le mois prochain la Grèce se trouve en défaut de remboursement de la dette vis à vis de ses créanciers européens, le FMI en revient à une vieille méthode qu’il a utilisée fréquemment lors de la crise de la dette en Amérique latine pendant les années 1980. Ce sursis donnerait aussi au FMI et à ses partenaires européens un répit pour traiter leurs différences d’approche en ce qui concerne la croissance et les perspectives budgétaires de ce pays toujours embourbé dans une crise financière. Mais le compromis élégant du Fonds laisse la Grèce sous la menace du surendettement. Réduire son fardeau suppose que l’Europe agisse en fonction de la logique et de la nécessité économiques et non pas en fonction des politiques nationales des pays membres.


L’Europe et le FMI ne sont pas parvenus à concilier leurs différences de point de vue sur la viabilité de la dette grecque, au point qu’elles s’affichent maintenant au grand jour. Guidés essentiellement par une analyse des flux financiers, les autorités européennes considèrent que la faiblesse des taux d’intérêt et les longues maturités ont rendu la dette grecque soutenable. Mais le Fonds souligne que le niveau de la dette de la Grèce (presque le double de son PIB) dissuade l’investissement et l’arrivée de capitaux. Il estime qu’une réduction significative de cette dette est cruciale pour susciter la confiance et restaurer la crédibilité nécessaire pour extraire la Grèce d’une longue période d’appauvrissement.

Ce n’est pas le seul point de désaccord entre l’Europe et le FMI, les deux principaux créanciers de la Grèce. Ils sont aussi en désaccord sur le réalisme de certaines prévisions économiques majeures, dont la relation étroite qui existe entre la croissance et le budget du pays, l’Europe adoptant une perspective beaucoup plus optimiste que le Fonds.

Pour ceux d’entre nous qui suivent la tragédie économique grecque depuis longtemps, une grande partie du point de vue européen défie la logique économique – et ceci pour une simple raison : les dirigeants européens craignent les conséquences en politique intérieure d’un allègement de la dette grecque, tout particulièrement avant les élections qui auront lieu en septembre en Allemagne. Ils craignent qu’un tel allègement mine la crédibilité des partis de gouvernement et favorise les mouvements extrémistes.

Il est certes délicat de faire une croix sur toute une partie de la dette grecque, d’autant que cela pose des questions compliquées en matière d’équité et d’incitation. Pourtant dans certains cas il arrive un moment où le refus de renoncer à une partie de la dette est plus néfaste que d’exiger à tout prix son apurement. De même que le FMI, les dirigeants européens savent que la Grèce en est depuis longtemps à ce stade qui la met de fait sous tutelle permanente dans une zone euro pour laquelle ce n’est pas une situation satisfaisante. Mais les dirigeants européens semblent incapables d’agir.

L’Europe et le FMI ne parvenant pas à se mettre d’accord, la Grèce est privée du financement supplémentaire qui lui permettrait de rembourser ses arriérés sur le plan intérieur et d’assurer en juillet le service très coûteux de sa dette extérieure. Malgré l’amélioration des résultats économique de l’UE, la croissance de la Grèce est à nouveau anémique. Pour sortir de l’impasse, le FMI fait un compromis en donnant son “accord de principe” pour participer à un programme de financement, la méthode qu’il avait utilisée dans les années 1980.

Un accord de principe indique le soutien du Fonds au projet économique d’un pays, ce qui permet de débloquer d’autres financements (dans ce cas, de l’Europe). Mais il n’accorde de prêt que lorsqu’il y a garantie de financement (dans ce cas, un allégement significatif de la dette grecque).

C’est un compromis à court terme qui prend en compte le calendrier politique et les contraintes de l’Europe et va éviter à la Grèce de faire défaut cet été, tout en sauvegardant les ressources du FMI. Cette disposition implique un transfert d’une partie du poids du financement à l’Europe, ce qui paraît logique. Et c’est également un signe d’unité, malgré les désaccords importants qui subsistent.

[bsa_pro_ad_space id=1]

Mais ce n’est rien d’autre qu’une nouvelle solution temporaire – ou pour être moins indulgent, la prolongation de la stratégie consistant à faire “comme si” la Grèce était solvable. Elle assure le financement immédiat, mais n’est pas suffisante pour mettre le pays sur la voie de la croissance et du rétablissement financier à moyen terme. Elle pourrait aussi exposer le FMI à de fortes pressions politiques et soulever de plus en plus la question légitime d’un traitement de faveur de la Grèce.

Ayant fait un compromis, le FMI devrait s’en tenir à ses engagements et attendre pour intervenir que l’Europe s’engage à alléger encore la dette de la Grèce et que ses exigences techniques soient satisfaites. Et plutôt que de crier victoire, comme ont eu tendance à le faire les ministres des Finances de la zone euro dans une déclaration de mi-juin, les responsables européens devraient considérer ce compromis comme la première étape d’un radoucissement de leur position de plus en plus intenable sur la dette grecque.

Avant d’agir, les deux partis seraient bien inspirés de faire une analyse fine des programmes précédents. Bien définis, incluant une courte période de transition pour que le changement voulu soit effectif, ces programmes peuvent entraîner un relâchement des contraintes qui pèsent sur la croissance et l’équilibre financier. Ils doivent participer à un processus constructif, ils ne constituent pas une solution à eux tout seuls.

Au cours des années 1980, malgré quelques difficultés, la succession de ces programmes a aidé plusieurs pays d’Amérique latine à retrouver une croissance élevée et à restaurer leur équilibre financier, grâce notamment à des réductions significatives des dettes (et de leur service) qui ont évité des défauts perturbateurs. Quelques années plus tard, ce processus a été repris avec succès dans le cadre de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE).

Le difficile compromis à court terme entre le FMI et l’Europe vient après des mois de discussions parfois houleuses. Dans l’intérêt de la Grèce et pour la crédibilité de leurs interactions futures, ils devraient considérer ce compromis comme un premier pas vers la résolution définitive (et très tardive) de la crise grecque. Cela fait trop longtemps que les citoyens grecques attendent en souffrant. Traduit de l’anglais par Patrice Horovitz

Mohamed A. El-Erian est conseiller économique en chef d’Allianz. Il a été président du conseil de développement mondial du président Obama. Il est également auteur d’un livre intitulé The Only Game in Town: Central Banks, Instability, and Avoiding the Next Collapse

par Mohamed A. El-Erian

[bsa_pro_ad_space id=1] [bsa_pro_ad_space id=2] [bsa_pro_ad_space id=3] [bsa_pro_ad_space id=4] [bsa_pro_ad_space id=5] [bsa_pro_ad_space id=6]
Back to top button